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Des parachutes dans les avions de ligne ?

Camarades aérophobes, sauriez-vous sauter en parachute ? A priori, non. Donc pourquoi cette si lancinante question de savoir pourquoi les avions de ligne ne sont pas équipés de parachutes est-elle aussi obsédante ?

Avec la sortie de la saison 3 de l’excellente série ARTE Tu mourras moins bête (mais tu mourras quand même), illustrée par Marion Montaigne et narrée par François Morel, est venue une superbe occasion de se demander pourquoi diable les avions de ligne ne sont pas équipés d’un parachute par passager.

Après tout, l’armée en fait bien un usage intensif et, depuis le temps que cette technologie existe, il reste étonnant que sa principale utilisation civile soit récréative !

Quelques rappels sur le fonctionnement des avions de ligne

À force d’avoir accès aux vols de court, moyen et long-courrier pour n’importe lequel de nos déplacements, l’épatante technicité des avions a parfois tendance à s’effacer devant la banale commodité de l’ordinaire.

Appartenant à cette physique du quotidien souvent un peu floue, les avions n’en sont pas moins issus d’une technologie qui a rendu réel à grande échelle un des plus vieux rêves de l’Homme : voler.

Une ingénierie qui en était pourtant à ses balbutiements il y a à peine plus d’un siècle. Et dont la démocratisation en vols commerciaux n’a éclaté qu’après la Seconde Guerre mondiale. Pour resituer l’énormité de ces progrès techniques, quelques rapides rappels s’imposent.

  • Comment vole un avion ?

L’explication parfaite de Jamy de C’est pas sorcier en moins d’une minute !

Tout simplement, l’avion est aspiré.
L’air qui passe au-dessus de l’aile bombée est accéléré. Par conséquent, sa pression est plus basse que celle de l’air qui passe en dessous. Cela crée une dépression qui « pousse » l’aile vers le haut et engendre la fameuse portance.

La technologie mise en œuvre pour faire tenir un avion en l’air relève toutefois d’une complexité bien plus avancée. Pas moins de quatre vecteurs entrent en jeu : poussée, trainée, portance et poids.

Pour ceux qui souhaitent en savoir plus, Science étonnante a la réponse technique !

  • Quelques chiffres à retenir sur les avions de ligne

  • Poids

    Moyens courriers : autour de 50 à 70 tonnes - Longs courriers : autour de 250 tonnes

  • Coût

    36 millions d’euros

  • Vitesse de croisière

    800 à 900 km/h

  • Altitude de croisière

    10 000 km

Un des plus gros avions de ligne, l’Airbus A380, est doté de 500 sièges et peut accueillir 853 passagers au maximum, mais aucune compagnie n’est allée jusque-là. Il pèse 270 tonnes à vide et a une capacité maximale de 575 tonnes.

  • Voler en toute sécurité

Tu mourras moins bête — La peur en avion
Épisode disponible jusqu’au 01/04/2024

Rassurez-vous, de très nombreuses mesures de sécurité sont appliquées aux avions :

  • Vérification des pièces lors de la construction
  • Entretien régulier
  • Tests de collision avec des canons à poulets
  • Formation des pilotes qui passent quatre fois par an dans un simulateur de vol
  • Repas différents pour les pilotes (2 repas différents préparés à 2 endroits différents de l’aéroport)
  • Fréquence des accidents d’avion

Le pourcentage de sécurité de l’avion par rapport à d’autres modes de transports est toutefois difficile à cerner exactement. Pour deux raisons : les références temporelles considérées et les types de vols pris en compte.

Il semble en effet qu’une partie des données à la fois fiables et disponibles en ligne (produites par l’UE) n’aient pas été réactualisées depuis 2002. Et ce, alors que de nouvelles flottes plus sûres ont été largement déployées depuis. De plus, certaines estimations intègrent toutes les catégories d’avions civils alors que le pourcentage d’accidents apparaît plus élevé sur les petits appareils de tourisme.

On trouve ainsi d’innombrables infographies qui portent sur le nombre d’incidents, mais sont basées sur des calculs pas toujours limpides. L’avion peut de la sorte être caractérisé par un accident sur 1,2, 8 ou 12 millions de vols selon les références utilisées.

Autant donc, prendre le chiffre de Tu mourras moins bête qui affirme que l’avion est 17 fois plus sûr que la voiture en 2017 : 1600 morts/an pour l’avion contre 1,3 million de morts/an pour la voiture.

D’ailleurs, contrairement à ce qu’Hollywood voudrait nous faire croire, la plupart des risques de crash ne se produisent pas pendant le vol à haute altitude en lui-même. Mais bien, pour au moins 70 % des cas :

  • Pendant le décollage (3 premières minutes de vol)
  • Lors de l’atterrissage (8 dernières minutes de vol)

Certes aussi près du sol, un parachute n’est pas exceptionnellement utile. Le temps de l’enfiler et de sortir, l’avion est largement déjà arrivé au sol. Mais qu’en est-il à plus haute altitude ?

Pourquoi n’y a-t-il pas de parachutes dans les avions de ligne ?

Pour les potentiellement 30 % d’accidents restants qui se passent à plus haute altitude que le tarmac de l’aéroport, la question des parachutes peut légitimement se poser. Et c’est là qu’apparaît leur redoutable impraticabilité !

Tu mourras moins bête — Les parachutes
Épisode disponible jusqu’au 23/02/2025

  • Une question d’encombrement

  • Place

    25 cm²/personne (déjà bien remplis)

  • Poids

    12 kg/parachute pour 853 passagers, soit dix tonnes de parachutes en plus du reste !

  • Coût

    Celui du déploiement d’un parachute par passager sur l’ensemble de la flotte aérienne civile

Mais, vous pourriez objecter qu’avec une capacité maximale de 575 tonnes, ce n’est pas dix tonnes de parachutes en plus qui vont poser un véritable problème.

Certes, mais il n’y a pas que cet aspect à prendre en compte !

  • Une question de physique élémentaire

À 1000 km/h et 12 000 m d’altitude :

  • l’avion va trop vite et est trop haut pour permettre une survie sans matériel spécifique : bonbonne d’oxygène pour lutter contre l’asphyxie et de bonnes couvertures de survie pour résister aux -58 °C

  • il faudrait appliquer une pression de plus d’une tonne pour ouvrir les portes (vers l’intérieur qui plus est parce que ce n’est pas drôle sinon)

  • le risque d’éjection lors de la dépressurisation est problématique pour la bonne capacité du personnel de bord à surveiller tout le monde (sans parler de l’intégrité physique des éjectés)

Vous pourriez objecter que l’avion en détresse va avoir tendance à perdre de l’altitude et de la vitesse, voire se stabiliser afin de permettre aux passagers d’évacuer en sécurité.

Certes, mais il n’y a pas que cet aspect à prendre en compte !

  • Une question d’expérience

Pour un saut en catastrophe, les 500 passagers de l’avion en détresse — quel que soit leur âge et leur état de santé — doivent :

  • Se rappeler comment sauter en parachute (mais si, l’hôtesse de l’air l’a expliqué au début du voyage)

  • Savoir gérer leur panique et celle contagieuse de leurs voisins (ce qui implique un sacré mental d’acier)

  • Éviter les réacteurs (étant donné que les portes ne sont pas toutes idéalement placées pour les éviter)

Si vous avez une objection, n’hésitez pas à la partager dans les commentaires !

Toutefois, admettons que tous les passagers soient formés efficacement au saut en parachute, il n’y a pas que cet aspect à prendre en compte !

  • Une question d’impraticabilité pour les sauveteurs

Avec un saut toutes les 2 secondes (en supposant une absence de panique et un professionnalisme absolu des passagers), il faut compter 28 minutes pour faire sauter tout le monde (hors personnel de bord). Les rescapés se retrouvent ainsi étalés sur… 500 km !

Le plus simple, si la poursuite du vol est impossible, reste donc encore de faire atterrir/amerrir l’avion et d’utiliser les toboggans. Normalement, tout le monde sait glisser correctement dessus au moins depuis ses 4 ans !

Ce qu'il faut retenir

Équiper tous les avions de ligne d’un parachute par passager n’est ni rentable ni intéressant pour plusieurs raisons :

  • le coût total de l’opération par rapport au pourcentage d’accidents en vol

  • l’encombrement supplémentaire que cela génère

  • la dangerosité des sauts en parachute à 12 000 m d’altitude et à -58 °C

  • l’absence d’expérience des passagers associée à leur propension à la panique (collective ou non)

  • l’impraticabilité pour les sauveteurs

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