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Connaître et reconnaître les figures de style

Si vous avez fait ne serait-ce qu’un peu d’analyse de textes littéraires, vous savez déjà que l’emploi d’une figure de style n’est pas anodin. Et, que ce n’est pas un hasard si leur étonnante diversité de formes se retrouve un peu partout, aussi bien à l’écrit qu’à l’oral.

Ainsi, apprendre à connaître, reconnaître et utiliser à dessein les figures de style permet, non seulement, de mieux comprendre le style de vos auteurs favoris, mais également d’améliorer votre style d’écriture !

À quoi servent les figures de style ?

  • Produire un effet

Une figure de style est, avant tout, une utilisation originale de la langue afin de produire un effet.
Exagération ou réduction d’un élément, ton humoristique ou dramatique, jeu grammatical ou phonétique… La palette des effets est exceptionnellement variée.

Et pour cause, une figure de style peut, selon le contexte, générer deux effets entièrement opposés ! C’est d’ailleurs la raison pour laquelle toute définition d’une figure de style s’attache en priorité à décrire le mécanisme employé et non la diversité des résultats créés.

Certes, certaines figures de style deviennent des poncifs.
On peut citer, entre autres :

  • les allitérations en « s » pour simuler ces si agaçants sifflements de serpents,
  • les grandiloquentes hyperboles pompeuses à visée ironique,
  • les gradations en trois temps de certains discours politiques,
  • les homéotéleutes dans la publicité parce que vous n’avez pas assez bien compris qu’il est « Fou Afflelou »…

Mais cela ne doit pas être un prétexte pour les enfermer uniquement dans ces usages et nier leur potentiel bien plus varié.

  • Accompagner le ton d’un texte

Car le but principal d’une figure de style, ce n’est ni plus ni moins que de compléter, le plus finement possible (mais pas nécessairement discrètement), le ton voulu par l’auteur.
À noter d’ailleurs qu’un écrivain n’adopte pas ces mécanismes littéraires par pur plaisir sadique d’inside joke érudite, contrairement à ce que peuvent laisser à croire certaines figures au nom inintelligible.

Ainsi, pour bien comprendre le sens de l’hyperbole ultra-connue de Cyrano décrivant son nez « C’est un roc ! c’est un pic ! c’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ?… C’est une péninsule ! », il n’est pas indispensable d’être au courant qu’il s’agit en fait d’un adynaton. Soit une forme d’hyperbole tellement exagérée que l’information en devient inconcevable et dont l’effet visé est souvent humoristique.

Toutefois, si les figures de style se retrouvent partout et que, un peu comme Monsieur Jourdain avec sa prose, nous en usons et en abusons sans le savoir, il n’en reste pas moins intéressant d’être en mesure de les différencier et de les reconnaître.

En effet, cette connaissance peut être utile aussi bien au lecteur, qui accède alors à une compréhension enrichie du texte, qu’à l’écrivain, qui peut ainsi améliorer son style de manière éclairée et renforcer l’adéquation entre termes ou structures choisies et ton voulu.

Challenge Figures de style

  • Niveau 1 : partagez dans les commentaires des usages de figures de style que vous adorez
  • Niveau 2 : partagez un usage peu connu ou inédit d’une figure de style !

Connaître vingt figures de style plus ou moins courantes

Cet article propose, par conséquent, de cibler quelques clés de compréhension de figures de style répandues. Et, afin de les retenir efficacement, quoi de mieux qu’un peu d’humour, des exemples à foison et des suggestions d’astuces mnémotechniques tirées de l’esprit fantasque de Links the Sun ? (Gradation en 3 temps)

Toutes les définitions proposées, sauf indication contraire, sont tirées du Larousse.

Amateur d’analyses de textes (musicaux en particulier) et de satire sous toutes ses formes, ce Youtubeur n’a pas sa langue dans sa poche (Euphémisme) ! À force de les lire et de les manier au quotidien, Links the Sun est tout sauf un néophyte en matière de figures de styles.

Litote et Euphémisme — 3:27

Litote : Figure de rhétorique consistant à affaiblir l’expression de la pensée pour laisser entendre plus qu’on ne dit.
Exemple : « Va, je ne te hais point. » (Le Cid, Corneille)
Parce que c’est connu que les hommes sont doués en interprétation de sens caché.

Euphémisme : Atténuation dans l’expression de certaines idées ou de certains faits dont la crudité aurait quelque chose de brutal ou de déplaisant.
Exemple : « Il s’est éteint » (Langage courant)
Étonnement, il ne semble pas y avoir d’euphémisme courant pour « Il est né ». Même si « Ils ne dormiront plus » véhicule une idée équivalente pour les parents.

Hyperbole — 4:21

Figure de rhétorique consistant à mettre en relief une idée en employant des mots qui vont au-delà de la pensée. C’est plus ou moins l’inverse de l’euphémisme.
Exemple : « Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois » (Le Corbeau et le Renard, La Fontaine)
Parce que vanité et hyperbole sont souvent corrélées textuellement.

Gradation — 5:00

Figure de rhétorique qui consiste à disposer les termes d’une énumération dans un ordre de valeur croissant ou décroissant.
Exemple : « C’est un roc, c’est un pic, c’est un cap, que dis-je, c’est une péninsule. » (Cyrano de Bergerac, Edmond Rostand)
Gradation ici doublée d’un adynaton, ce qui prouve bien que même avec une figure de style « simple », il ne faut jamais baisser sa garde.

Assonance et Allitération — 5:37

Assonance : Répétition d’un même son vocalique dans une phrase
Exemple : « Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire » (Phèdre, Racine)
#parano #BillieEilish #laviecestdelamerde

Allitération : Répétition d’une consonne ou d’un groupe de consonnes, dans des mots qui se suivent, produisant un effet d’harmonie imitative ou suggestive.
Exemple : « Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ? » (Andromaque, Racine)
Parsssssssse que

Anaphore — 6:25

Reprise du même mot au début de phrases successives. Cet effet met l’accent sur le sujet du discours.
Exemple : « Qui dit études dit travail. Qui dit taf te dit des thunes. Qui dit argent dit dépenses. Qui dit crédit dit créance. » (Alors on danse, Stromaé)
Une répétition ciblée sur le début de phrase. Qu’est-ce qu’on disait sur les figures de style « simple » à ne pas sous-estimer ?

Chiasme — 6:59

Disposition en ordre inverse de deux phrases syntaxiquement identiques, formant une antithèse ou constituant un parallèle. Construction de type A B B’ A’, qu’elle soit grammaticale, phonétique, sémantique…
Exemple : « La neige fait au Nord, ce qu’au Sud fait le sable. » (La légende des siècles, Victor Hugo)
#poésie

Comparaison et Métaphore — 7:59

Comparaison : Rapport de ressemblance établi entre deux termes d’un énoncé grâce à un troisième terme introducteur (comme, ainsi que, etc.).
Exemple : tu as l’air d’être ailleurs
Parce que parfois les figures de style, c’est simple.

Métaphore : Emploi d’un terme concret pour exprimer une notion abstraite par substitution analogique, sans qu’il y ait d’élément introduisant formellement une comparaison.
Exemple : « Tu as la tête ailleurs » pour « Tu es étourdi »
En somme, c’est une comparaison alambiquée (si la comparaison est la pomme, la métaphore serait-elle donc le calva ?)

Métonymie — 8:37

Phénomène par lequel un concept est désigné par un terme désignant un autre concept qui lui est relié par une relation nécessaire.
Exemple : « Rodrigue, as-tu du cœur ? » (Le Cid, Corneille)
Parce qu’il y a peu de chances qu’il réponde : « Non, j’ai juste un poumon ».

Synecdoque — 9:08

Variété de métonymie qui consiste à élargir ou à restreindre le contenu sémantique d’un mot.
Exemple : La France championne du monde en 2018
Cette figure de style est tellement élégante que le cinéma l’a transposée en un effet visuel qui en jette (par exemple quand on voit l’ombre d’un personnage au lieu du personnage directement).

Antithèse — 9:45

Procédé stylistique qui consiste à opposer, dans la même phrase, deux mots ou groupes de mots de sens contraire afin de mettre une idée en relief par un effet de contraste.
Exemple : « J’irais peut-être au paradis, mais dans un train d’enfer » (Harley-Davidson, Brigitte Bardot)
Parce qu’on aime s’emmêler les pinceaux.

Oxymore — 10:00

Figure de style qui réunit deux mots en apparence contradictoires.
Exemple : « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » (Le Cid, Corneille)
L’art d’être clair tout en étant obscur.

Pléonasme — 10:22

Répétition dans un même énoncé de mots ayant le même sens.
Exemple : monter en haut ou voir de ses yeux
Parce qu’il arrive que dire les choses une seule fois ne suffise pas.

Énallage — 11:10

Substitue une forme grammaticale à une autre, une sorte de faute de grammaire volontaire (définition introuvable dans le Larousse).
Exemple : « Si j’avais su, j’aurais pas venu », « chanter faux », « parler cru »
Comme quoi, la vérité sort effectivement toujours de la bouche des enfants. Même quand ils font des fautes, cela a du sens.

Prétérition — 12:20

Procédé de style par lequel on déclare passer sous silence une chose dont on parle néanmoins par ce moyen.
Exemple : « La première règle du Fight Club est : on ne parle pas du Fight Club » (Fight Club, Chuck Palahniuk)
Une excellente figure de style pour être hypocrite sans en avoir l’air. « Je ne vais pas dire que tu fais tout au dernier moment… mais, t’y prendre la veille pour le lendemain n’est pas ce qu’il y a de plus sain » (critique de la procrastination en prétérition).

Homéotéleute — 13:18

Répéter la même syllabe à la fin d’un groupe de mots. Très utilisé dans la publicité (définition introuvable dans le Larousse).
Exemple : « Un jour de canicule sur un véhicule où je circule, gesticule un funambule au bulbe minuscule » (Exercices de style, Raymond Queneau)
Parce que les insupportables slogans publicitaires deviennent tout de suite tellement plus distingués : « Quand y’en a marre, y’a Malabar », « Carglass répare, Carglass remplace »…

Épanadiplose — 14:23

Finir une proposition par le même mot ou groupe de mots qui l’a commencée (définition introuvable dans le Larousse).
Exemple : « Rien ne me verra plus, je ne verrais plus rien. » (La légende des siècles, Victor Hugo)
#tristesse

Epizeuxe — 15:37

Répéter un mot ou un petit groupe de mots (introuvable dans le Larousse).
Exemple : Voyage, Voyage. (Voyage Voyage, Desireless)
#voyage

Mot-valise — 16:31

Mot résultant de la réduction d’une suite de mots à un seul mot, qui ne conserve que la partie initiale du premier mot et la partie finale du dernier.
Exemple : franglais, Salamèche
La culture littéraire par les Pokémons !

Prosopopée — 17:17

Figure de rhétorique par laquelle l’auteur prête la parole à un absent ou à un être inanimé.
Exemple : Les animaux dans les fables de La Fontaine
Ou les objets dans les fables de La Fontaine.

Anacoluthe — 17:45

Rupture ou discontinuité dans la construction d’une phrase.
Exemple : « Le nez de Cléopâtre, s’il eut été plus court, toute la face de la Terre en aurait été changée ». (Les Pensées, Pascal)
Un peu comme une énallage, mais en plus compliqué.

Zeugma/Syllepse/Antanaclase — 18:52

Zeugma : Coordination de deux ou plusieurs éléments qui ne sont pas sur le même plan syntaxique ou sémantique.
Exemple : « J’ai pris le plat du jour et deux kilos. »
L’art de factoriser ses phrases.

Syllepse (stylistique et non grammaticale) : Figure de rhétorique qui consiste à employer un mot à la fois dans son sens propre et dans son sens figuré.
Exemple : J’aime la poutine, mais pas en Russie.
L’art d’exploiter la polysémie sans répétition.

Antanaclase : Répétition d’un même mot pris dans un sens différent.
Exemple : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. » (Les Pensées, Pascal)
L’art d’exploiter la polysémie avec répétition. #criquette&brett

Antonomase : 21:20

Figure de style consistant à remplacer un nom commun par un nom propre ou inversement.
Exemple : caractériser quelqu’un d’Apollon ou utiliser une marque pour désigner le produit (Sopalin, Scotch, Frigidaire…).
Barème, poubelle, béchamel, pantalon, ampère, volt, watt, ohm, tesla, joule, coulomb, pascal, hertz ou encore newton sont tous issus d’antonomases de noms propres !

Métalepse — 22:26

Figure de rhétorique proche de la métonymie par laquelle on fait entendre l’antécédent par le conséquent (« Hélas ! nous le pleurons », pour « Hélas ! il est mort »), ou le conséquent par l’antécédent (« Ils ont vécu », pour « Ils sont morts »).
Exemple : « D’autres businessent avec le Diable et vite, leur tombe est fleurie. » (Dégâts collatéraux, MC Solaar)
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Ce qu'il faut retenir

  • Les figures de style correspondent à une utilisation originale de la langue.
  • Elles produisent une impressionnante variété d’effets.
  • Elles agrémentent la tonalité du texte voulue par l’auteur.
  • Savoir les reconnaître enrichit la lecture et l’écriture.

Ne vous laissez pas avoir par l’apparence alambiquée du nom de certaines que l’on pourrait croire tirées d’un esprit lovecraftien en quête de nouveaux blases hors de ce monde.

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